Conseil fiscal N° 39: Traitement fiscal des gains en capital sur des éléments de la fortune privée

En Suisse, les gains en capital réalisés lors de l’aliénation d’éléments de la fortune privée sont en principe exonérés d’impôt - une disposition favorable pour les contribuables concernés. Cependant, cette exonération fiscale peut ne pas s’appliquer dans certaines situations et entraîner des conséquences fiscales inattendues. Il existe des situations qu’il vaut mieux, si possible, éviter notamment en cas de vente ou transmission de sa société ou en matière de participation de collaborateur.

Quand est-ce que les gains en capital sur des éléments de la fortune privée sont-ils imposés?

Cette question n'est pas anodine. La vente d’actions, d’œuvres d’art ou d’autres actifs provenant de la fortune privée est généralement exonérée de l’impôt sur le revenu. Toutefois, l’exonération fiscale peut ne pas s’appliquer lorsque les éléments de fortune privée sont transférés à la fortune commerciale.

Que se passe-t-il lors d’un transfert de la fortune privée à la fortune commerciale?

Une prudence particulière est de mise lors du transfert d’actions détenues dans la fortune privée:

Par exemple, si le contribuable transfère une participation à une société dans laquelle il détient 50% ou plus du capital-actions (société contrôlée), la différence entre le prix de la transaction et la valeur nominale de la participation (y compris les réserves pour apport de capital) est soumise à l’impôt sur le revenu. On parle alors de «transposition».

La vente de 10% ou plus d'actions de la fortune privée à des tiers qui les détiendront dans la fortune commerciale (par exemple une holding d’acquisition), peut également entraîner des conséquences fiscales. En effet, si une distribution de la substance non nécessaire à l’exploitation, alors qu'elle était déjà susceptible d'être distribuée au moment de la vente, est effectuée dans les cinq ans suivant ladite vente, on parle de «liquidation partielle indirecte». Le gain en capital initialement exonéré et partiellement ou totalement requalifié en rendement de fortune mobilière imposable.

Il existe néanmoins des possibilités d'éviter ou de réduire les conséquences fiscales d'une transposition ou d'une liquidation partielle indirecte en analysant la situation avant d'effectuer la transaction.

Comment appréhender les risques fiscaux liés à la participation de collaborateur ou à la succession à la tête de d'une société?

  • L'octroi de participations de collaborateur est un moyen répandu pour fidéliser à long terme les collaborateurs clés dans d'une société. Ces participations offrent aux collaborateurs la possibilité de participer au succès de son employeur. Cependant, il convient d'être conscient des conséquences fiscales liées à ce type de rémunération.
    De manière générale, il faut toujours considérer les transactions d’actions liées à une relation de travail, actuelle ou future, sous l'angle des principes liés aux participations de collaborateur. Seules les actions de fondateur dont la définition est limitée ou les transferts au sein d’une famille représentent des exceptions.
    Si les conséquences lors de l'octroi des actions ou l'exercice des options sont la plupart du temps maitrisées, il convient d'être attentif également aux conséquences lors de la vente des participations de collaborateurs. En effet, lorsque ces participations sont cédées dans un délai de cinq ans suivant leur acquisition et que l'acquisition initiale a été imposée sur la base d'une valeur de formule (par exemple selon la méthode des praticiens), la différence entre le prix de vente et la même valeur de formule au moment de la vente sera requalifiée en salaire imposable. Dans un nombre important de situations, cela signifie donc que seule une partie du gain en capital sera exonéré de l’impôt. Il faut savoir également que beaucoup de cantons considère que la vente à un collaborateur d’une participation, même substantielle (par exemple plus de 50 %), dans le cadre d'une transmission d'entreprise, est assimilée à une participation de collaborateur, ce qui peut limiter le montant du gain en capital exonéré au moment de la vente.

  • Transmission d'entreprise: dans le cadre d'une transmission d'entreprise, le paiement d'un complément de prix («earn out»), est susceptible d’entraîner des conséquences fiscales. Plus particulièrement, lorsque l'actionnaire vendeur poursuit son activité au sein de l'entreprise vendue et si, par exemple, les conditions de maintien de l’emploi ne sont pas conformes au marché, ce complément de prix pourrait être considéré comme un salaire et non un gain en capital privé. En outre, si l'octroi d'actions de la société acquéreuse à l'actionnaire-vendeur est négocié en plus du maintien de l’emploi, cet octroi pourrait également être considéré comme une participation de collaborateur. Dans ce cas et dépendamment des circonstances, le prix négocié pourrait ne pas être considéré comme une valeur vénale, mais comme une valeur basée sur une formule ad hoc avec pour conséquence une requalification partielle du gain en capital privé en salaire au moment de la vente ultérieure.

Planification anticipée de gains en capital exonérés d’impôt

S’agissant de gains en capital sur des éléments de la fortune privée, il est conseillé de toujours effectuer une vérification minutieuse d’un point de vue fiscal pour éviter les mauvaises surprises. En particulier lors du transfert d’éléments de la fortune privée à la fortune commerciale, mais également en cas de participations de collaborateur et de transmission d’entreprise. Il est essentiel de planifier et de documenter soigneusement toutes les transactions. Il est opportun de consulter un expert dès le début afin de s’assurer que toutes les opérations sont conformes au marché et qu’il n’y a pas de pièges fiscaux cachés. Une approche réfléchie et bien structurée peut aider à tirer pleinement parti des avantages fiscaux et à éviter les charges fiscales imprévues. Nos spécialistes vous fourniront des conseils détaillés et adéquats.

Check-list: pour le maintien de l'exonération fiscale de vos gains en capital

  • Fortune privée ou commerciale?

    Vérifiez si les éléments de votre fortune ont été utilisés à des fins purement privées ou s’ils ont pu l'être à des fins commerciales.

  • Vérifier les transferts d’actions

    Lors du passage de la fortune privée à la fortune commerciale, être attentif à la requalification du gain en captail privée en rendement de fortune mobilière sous l'angle de la «transposition» ou de la «liquidation partielle indirecte».

  • Prix conforme au marché

    Assurez-vous que tous les achats et ventes sont effectués à des prix conformes au marché.

  • Planifier suffisamment tôt

    Qu’il s’agisse d'un transfert d’actions, d’une participation de collaborateur ou d’une succession à la tête de l'entreprise, planifiez à temps et consultez une experte ou un expert en droit fiscal.

  • Obtenir un ruling fiscal

    En cas d’incertitude, demandez un ruling fiscal pour plus de clarté et pour votre sécurité sur le plan juridique.